Last Updated on 13 novembre 2020 by Thibault Dreze
« Trouble in paradise ? » pourrait-on écrire tant la situation de Burnley devient délicate et pourrait rendre la saison très compliquée, alors que tout fonctionnait jusqu’ici. Si dans le Lancashire on a pas de pétrole, mais des idées, à force de se gratter la tête Dyche a perdu tous ses cheveux.
Burnley est en Premier League depuis 2016, et entame donc sa cinquième saison consécutive parmi l’élite et le manager, Sean Dyche, est à la tête des Clarets depuis 2012. La stabilité règne donc dans la cité du Lancashire. Mais en ce début de saison, le coach anglais est mécontent. Parce que Burnley a laissé partir gratuitement Jeff Hendrick (24 matches, 2 buts, 2 assists l’an dernier), Aaron Lennon (16 matches) et Joe Hart qui faisait office de numéro 2, mais n’a toujours pas fait de recrues marquantes, et cela sera nécessaire pour se maintenir une saison de plus. Un agacement compréhensible pour un coach habitué à devoir bricoler avec peu de moyen. Avec une certaine réussite jusqu’ici.
100% british, ou presque
Burnley c’est aussi un club niché dans au coeur du Lancashire, bien loin de Londres, au nord des grandes agglomérations de Liverpool et Manchester, coincé entre Leeds et la mer d’Irlande. « Il y a l’Angleterre rurale et verdoyante des cartes postales et des boîtes de Quality Street, qui n’existe plus guère que dans le souvenir et les fantasmes des visiteurs comme des Anglais eux-mêmes. Et il y a l’Angleterre profonde, celle que ni Gainsborough ni Constable n’ont peinte, industrielle et post-industrielle, dont le pittoresque est d’une tout autre nature; l’Angleterre de Burnley, par exemple, dont le club semble le prolongement naturel, l’émanation presque parfaite d’une anglicité d’un autre type », dépeint France Football.
C’est entre le château de Towneley Hall et les entrepôts victoriens qui bordent le canal Leeds-Liverpool qui se dresse Turf Moore. Un stade typiquement anglais pour un effectif quasiment 100% anglais le tout dirigé, et c’est assez rare pour le signaler, par un propriétaire anglais. Un cadre presque grisâtre pour une équipe qui pourrait, si on la connaît peu, s’associer à cette monotonie ambiante. Mais Burnley a plus d’un atout dans son sac.
Survivre avec trois francs six sous
Habitués au milieu et bas de classement depuis quelques années, les Clarets sont maîtres dans l’art de la régularité. Ce qui pourrait ne pas ressembler à une performance, en est réellement un vu les moyens financiers du club. En effet, avec un chiffre d’affaires annuel de 154 M€, Burnley se positionnait en 16e place des clubs de Premier League lors de la saison 2018-19.
Saison | Position |
---|---|
16/17 | 16 |
17/18 | 7 |
18/19 | 15 |
19/20 | 10 |
S’il est vrai que sur les 10 dernières années, le club a un peu fait l’ascenseur entre Premier League et Championship, il semble s’être stabilisé depuis le dernier retour à l’échelon le plus haut du foot anglais. La 7e place lors de la saison 2017/2018 fait presque office d’exploit. Les Clarets ont d’ailleurs payé leur parcours européen la saison suivante assez cher.
Payer cher, ce n’est pourtant pas une habitude à Burnley. Le record d’un peu moins de 45 millions dépensés sur le marché des transferts, lors de la saison 16/17, est bien loin des centaines de millions avancés par les autres clubs de PL.
Le record actuel du club en matière de transfert entrant est de 16,9 millions d’euros pour Ben Gibson en provenance de Middlesbrough à l’été 2018. Dans l’autre sens, le record est détenu par Michael Keane (28 millions €) un an auparavant. Si Burnley ne vend pas pour des sommes astronomiques, cela empêche aussi le club de dépenser énormément en nouvelles recrues. Dans ces cas là, on doit faire avec ce qu’on a et cette contrainte pousse souvent à devenir créatif.
«Nous ne sommes pas des géants sur le plan financier, et la raison pour laquelle nous sommes une équipe « anglaise » est que nous n’avons pas les ressources nécessaires pour aller chercher des joueurs en Europe, pas seulement à cause des ressources financières, mais aussi en termes de scouting», explique Sean Dyche à France Football.
«Nous devons trouver un équilibre entre la minimisation du facteur risque et le désir de faire progresser le groupe, car notre marge d’erreur est plus réduite que celle de nos rivaux. Nous n’avons pas les moyens de faire de ces erreurs qu’on répare en dépensant de l’argent.» Cette donnée explique aussi pourquoi l’effectif de Burnley a cette consonance britannique. Faire venir des joueurs étrangers, c’est prendre le risque que leur adaptation prenne du temps et ils sont souvent plus chers que dans les divisions inférieures anglaises.
Cette prudence, on l’a vu, porte ses fruits sur le plan sportif puisque que club arrive à se maintenir malgré ses moyens limités, mais aussi sur le plan financier. En effet, Burnley est le seul club qui a terminé toutes ses saisons passées en Premier League avec un bénéfice.
Des renforts désirés
Pourtant, cette saison, le club pourrait voir cet équilibre vaciller. En effet, la crise couve à Burnley. La relation entre le manager Sean Dyche et le président Mike Garlick, s’est détériorée. En cause, le besoin urgent pour le club de nouvelles signatures et les perspectives de rachat qui rende le club difficile à manoeuvrer.
Selon le Telegraph, deux consortiums américains se battent pour prendre le contrôle de Burnley et l’incertitude quant à l’avenir du club a compliqué les plans de recrutement. Même les joueurs de la première équipe s’inquiètent du manque de renforts. De plus, six joueurs de l’équipe première (Jack Cork, Ashley Westwood, Robbie Brady, Matt Lowton, Kevin Long et Phil Bardsley) seront libres de tout contrat l’été prochain.
Un autre grain de sel dans cette idylle du Lancashire est la divergence de vision sportive. Après des années passées à dénicher des talents cachés (comme Tarkowski ou Nick Pope), Dyche avait espéré un investissement accru dans l’équipe cet été en ciblant des joueurs plus établis. Mais Garlick a semblé réticent à modifier ce modèle qui a si bien fonctionné pour le club sous sa direction, une position qui semble avoir été durcie lors des discussions sur une vente potentielle. Pour le Telegraph, cela a, à son tour, aggravé les tensions avec le manager.
Une frustration que Dyche a eu du mal à cacher au début de saison et a critiqué l’échec du club à prolonger les contrats de certains joueurs. « Nous avons malheureusement laissé tomber ces contrats », déplorait-il. « C’est dans les mains du président maintenant. Je vais attendre de voir ce que le président fera avec ce problème. » Ambiance.
Avec trois défaites en autant de matches, difficile de donner tort au manager des Clarets. Burnley, et encore plus cette année avec la consistance qu’a pris la Premier League, doit injecter des renforts dans cet effectif peu étoffé. Le club cherche activement un milieu droit, c’est à ce poste que le manque se fait le plus sentir. Depuis le départ d’Hendrick, c’est le latéral droit Pieters qui dépanne, mais ce ne peut pas devenir une alternative durable. Dwight Mc Neil, grande promesse du club, ne peut pas non plus quitter son flanc gauche de prédilection. Voilà pourquoi Burnley a désespérément besoin d’un équivalent créatif à Mc Neil sur le côté droit.
«C’est un défi, nous savons que le groupe a besoin de renforts car nous avons perdu des joueurs à la fin du lockdown, de bons joueurs qui ont bien servi le club. Nous cherchons, mais ce n’est pas une situation facile lorsque vous regardez de si près les finances» expliquait Dyche en début de saison.
Cela fait deux saison que Dyche prévient le club du danger de laisser des contrats des joueurs arriver à leur terme. Il s’inquiète de voir ce scénario se répéter avec de joueurs comme Cork, 31 ans, ou Westwood, 30 ans, des serviteurs fidèles et des joueurs clés qui justifient une prolongation de contrat plutôt que payer cher pour les remplacer.
Le mercato se termine lundi soir et on ne pourra pas dire que Dyche n’avait pas exprimé son besoin de renforts. En espérant pour lui et le sympathique club de Burnley, que la deuxième session de janvier n’arrivera pas trop tard.