Ode à James Milner, le joueur de l’ombre de Liverpool

Last Updated on 13 novembre 2020 by Thibault Dreze

Jeudi passé, le jour que Liverpool attendait tant est enfin arrivé : les Reds étaient officiellement champions d’Angleterre, 30 ans après leur dernier sacre. À l’heure de dresser le bilan d’une saison maîtrisée de bout en bout, les noms de Van Dijk, Salah, Klopp, Mané, Henderson, Firmino ou Alexander-Arnold reviennent avec insistance. On entend moins souvent parler de James Milner. Il était temps de réparer cette injustice.


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« Funny story from training. I asked Jürgen if I could start this weekend. He said He’d think about it and walked off and then I said Ok. »

Ce tweet n’est évidemment pas de James Milner mais bien d’un compte parodique nommé « Boring James Milner » qui s’amuse à tweeter dans la même veine que le joueur lui-même. Il faut dire que le milieu de 34 ans a déjà gratifié la twittosphère de quelques posts devenus collectors de par leur manque total d’intérêt, que ce soit quand il parle de la hauteur de son gazon ou du nombre de sucres qu’il met dans son café.

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Mais qu’on ne s’y trompe pas, Milner n’est certainement pas un « boring » personnage, c’est un véritable pilier de l’équipe de Liverpool. Confronté à la concurrence de Wijnaldum, Henderson, Fabinho ou Naby Keita au milieu de terrain, il n’en demeure pas moins un maillon clé des derniers succès des Reds. Focus sur un des joueurs les plus sous-estimés d’Angleterre.

Au four et au moulin

Depuis cinq ans, lors des tests physiques de pré-saison, la même scène se répète. Les joueurs de Liverpool s’astreignent à une batterie de tests physiques, enchaînant les tours de terrain, poussant leur VO2 max jusqu’à sa limite jusqu’à finir sur les genoux. Et à ce petit jeu (façon de parler), c’est toujours le même qui truste la première place. Le colosse Virgil Van Dijk ? Oubliez. Les marathoniens du milieu Naby Keita ou Georginio Wijnaldum ? Vous n’y êtes pas. Les jeunes pistons sur les flancs Andrew Robertson ou Trent Alexander-Arnold ? Toujours pas.

C’est bien James Milner qui, malgré ses 34 piges, pousse l’effort le plus loin, et ce depuis 2015 et son arrivée chez les Reds. Jürgen Klopp likes that. surtout quand on connait l’exigence du gegenpressing si cher à l’entraîneur allemand . Une résistance qui se vérifie en match, où ce bon vieux James ne rechigne jamais à faire le tacle nécessaire ou à sprinter pour venir soulager sa défense en fin de match.

Mais résumer le natif de Leeds à sa seule condition physique serait bien réducteur. Milner possède également une grande intelligence de jeu. Polyvalent à souhait, il peut-être aligné à l’arrière latéral, en temps que récupérateur ou comme milieu offensif avec égal bonheur. Un profil apprécié de ses entraîneurs successifs d’autant plus que le numéro 7 des Reds est aussi très à l’aise dans la dernière passe.

Lors de l’édition 2017-2018 de la Ligue des Champions (lors de laquelle Liverpool est battu en finale par le Real) il délivre pas moins de neuf assists, soit le record sur une seule édition. En Premier League, ses chiffres sont tout aussi impressionnants : en 535 matchs, il score à 55 reprises et délivre surtout 83 passes décisives, ce qui en fait le huitième joueur le plus prolifique de l’histoire en la matière, le deuxième encore en activité dans la compétition reine, derrière David Silva.

Une générosité sans borne

Exemplaire dans le jeu, James Milner l’est aussi dans l’acting, dans ce qu’il dégage. Jamais avare en encouragements, en consignes, il a l’étoffe d’un grand capitaine, rôle qu’il partage avec Jordan Henderson. Preuve en est ce soir brumeux de FA Cup en février dernier. Pour ce match contre Shewsbury, Jurgen Klopp offre des vacances à tout le noyau pour éviter une trop grosse accumulation de matchs et aligne donc les U23. Pendant que ses coéquipiers se prélassent quelques jours dans des destinations exotiques, Milner tient à s’entraîner et à accompagner les jeunes pour ce match particulier.

Le bougre a toujours joué la carte du stakhanovisme jusqu’au bout, ne touchant jamais à aucun verre d’alcool, même à son propre mariage. Un dévouement total qui hausse inévitablement le niveau d’exigence dans un noyau, un véritable appel à l’émulation qui bonifie tout un groupe. C’est cette exigence envers les autres, mais surtout envers lui-même qui le maintient au top à 34 ans.

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Et pourtant, sa carrière a commencé on ne peut plus tôt : le jeune Milner débute en première division à l’âge de 16 ans, avec le club de sa ville, Leeds. Au même âge, il devient même le plus jeune joueur à inscrire un but en Premier League. Nous sommes en 2002, le Brésil de Ronaldo gagnait sa dernière Coupe du Monde et déjà Milner sévissait au milieu. Il était alors la next big thing, « le plus grand talent d’Angleterre » dixit Arsène Wenger himself.

Bon, il l’était, et pourtant James a dû se contenter de l’ombre avec l’éclosion des Rooney, Lampard et Gerrard. Ainsi, après la rétrogradation de Leeds, ce n’est pas tout en haut de l’affiche qu’il continue sa progression mais bien dans des clubs du subtop comme Newcastle puis Aston Villa. Avant de signer en 2010 pour Manchester City. L’occasion d’être partie prenante dans le projet ambitieux des Emiratis et de remplir son armoire à trophées avec deux championnats, une FA Cup et une League Cup sur les cinq années passées chez les Citizens…dans l’ombre des stars comme Yaya Touré ou Carlos Tevez.

En 2015, peu avant l’arrivée de Jurgen Klopp, il signe gratuitement à Liverpool, qui recrute dans le même temps Christian Benteke pour 46 millions d’euros. Les plus belles lumières naissent dans l’ombre.

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