Last Updated on 27 janvier 2021 by Thibault Dreze
Soixante-huit matches. Mille-trois-cent-soixante-neuf jours. Six-mille-cent-vingt minutes. C’est le temps que l’on aura dû attendre pour voir l’invincibilité de Liverpool à Anfield se conclure. Les deux principaux coupables : le penalty d’Ashley Barnes, et la prestation majestueuse de Nick Pope.
La dernière fois que la bande à Klopp s’était inclinée à domicile, c’était en 2017. Crystal Palace s’était alors imposé 2 buts à 1 sur la pelouse des Reds, avec un doublé signé Christian Benteke. Depuis lors, durant presque quatre ans, la forteresse d’Anfield est devenue imprenable, ne pliant pas sous les attaques adverses, semblant même se fortifier d’année en année. Mais, comme souvent dans le football, le vent peut très vite tourner. Le club du Merseyside connaît une saison compliquée, et peine à surmonter les problèmes qui s’accumulent. La saison précédente n’est plus qu’un lointain souvenir, et le Liverpool d’aujourd’hui n’est plus que l’ombre de la machine bien huilée mise sur pieds par Klopp. Que se passe-t-il donc ? Tentons d’analyser cela.
Un trou en défense
Un premier problème, peut-être le plus évident, se situe du côté de la défense. Le pilier central de l’équipe, Virgil van Dijk, est écarté des terrains depuis maintenant plusieurs mois, suite à sa blessure provoquée par la sortie désastreuse de Pickford lors du derby du Merseyside. À cela viennent s’ajouter l’indisponibilité de Joe Gomez, blessé depuis novembre, et la fragilité de Joel Matip. L’absence de van Dijk est problématique pour plusieurs raisons : au-delà de la stabilité défensive que le géant hollandais apportait à l’équipe, c’est sa contribution dans la phase de construction qui vient le plus à manquer.
La profondeur que donnent Salah et Mané permettait à van Dijk de monter ballon au pied, distillant les longs ballons pour le flancs, ou pour le trio d’attaque. De cette manière, le jeu de Liverpool restait rapide et dynamique. En montant autant, van Dijk gardait une ligne défensive très haute, permettant à Alexander Arnold et Robertson de se projeter vers l’avant. Sans lui, la différence est marquante. Liverpool semble plus fébrile, et certains joueurs, comme Alexander Arnold par exemple, sont loin d’être autant décisifs que la saison passée. Selon The Athletic, contre Burnley, TAA a tenté 18 centres, sans jamais trouver un partenaire.
Pour pallier ce problème, Klopp a naturellement fait descendre Fabinho d’un cran, comme souvent. Néanmoins, plutôt que de placer à ses côtés un jeune espoir, comme Neco Williams ou encore Rhys Williams, Klopp a préféré faire appel au capitaine Jordan Henderson. Bien que ce choix reste discutable au niveau tactique, ce qui frappe, en revanche, est le message que Klopp envoie aux jeunes. Une occasion pareille de pénurie défensive n’est pas prête de se représenter, et, si même dans de telles conditions, les jeunes centraux continuent d’être snobés par leur entraineur, quand pourront-ils jouer et se former ?
Un nouveau milieu
Le « départ » de Fabinho et Henderson, partis rejoindre les lignes défensives, a donc obligé Klopp à réinventer son milieu de terrain. Le problème semblait ne jamais devoir se poser après l’arrivée de Thiago cet été, en provenance du Bayern, mais la situation s’est vite compliqué. Une blessure et des problèmes de santé ont tenu le milieu espagnol éloigné des terrains pendant plusieurs semaines, rendant son intégration dans l’effectif plus laborieuse.
Bien sûr, un joueur du calibre de Thiago ne peut être qu’un plus pour l’équipe des Reds, mais il n’empêche qu’avec son style de jeu particulier, basé sur des passes dans les petits espaces plutôt que sur la recherche constante de la profondeur, l’équipe doit s’adapter. Vrai numéro six, Thiago est un métronome, un chef d’orchestre, dictant le rythme et le tempo. Néanmoins, avec le style d’Henderson et les incursions offensives de Wijnaldum, Liverpool s’est longtemps basé sur un jeu plus direct, très vertical. La venue de Thiago pourrait mettre un terme à cela. Devait-on vraiment changer une équipe qui gagne ?
Une attaque fatiguée
Enfin, bien que la majorité des problèmes soit due à l’absence de van Dijk, la situation en attaque inquiète aussi. L’arrivée de Diogo Jota cet été en avait surpris plus d’un, mais le portugais de 24 ans a su rapidement convaincre les supporters et le club, marquant à 9 reprises en 17 rencontres. Avec lui, Klopp a pu réinventer son attaque, passant d’un 4-3-3 de plus en plus prévisible à une sorte de 4-2-3-1, permettant d’aligner Jota avec le trio titulaire.
Malheureusement, alors que Liverpool semblait retrouver un rythme offensif convaincant, le nouvel achat des Reds se blesse en décembre. Cette blessure, qui vient remplir un peu plus l’infirmerie de Liverpool, ne fait que davantage souligner un problème que Jota avait réussi à effacer : le cas de Roberto Firmino. Le brésilien, autrefois élément décisif du trio, peine de plus en plus à s’imposer. Même pour un joueur de son style, préférant décrocher plutôt qu’attaquer la profondeur, 14 buts en 57 rencontres ne sont pas des chiffres convaincants. Sans remettre en question son apport dans la construction ainsi qu’en phase de non-possession, il est impératif pour Firmino de retrouver le chemin des filets, et l’harmonie avec Salah et Mané. Son rôle en tant que « 9.5 » lors des saisons précédentes avait ébloui les amateurs du ballon rond, et en avait fait un des joueurs les plus importants pour Klopp.
Liverpool peut se trouver de nombreux alibis pour expliquer la situation à laquelle le club fait face. L’incertitude liée aux blessures et à la crise sanitaire a chamboulé les plans de Klopp, l’obligeant à repenser l’entièreté de sa stratégie. Privé de ses meilleurs artilleurs, la méthode utilisée par Liverpool jusqu’ici peine à s’imposer. Comme l’a démontré la rencontre face à Burnley, Liverpool est en grande difficulté face aux équipes compactes et avec un bloc défensif très bas. Les contre-attaques se font rares, et la profondeur pour l’attaque est presque inexistante. Le besoin de renouvellement et de changement est plus que jamais évident. Il ne fait aucun doute que sans les blessures, le parcours de Liverpool aurait pu être fort différent. C’est au tour de Klopp de trouver une nouvelle méthode, une nouvelle vision, pour réinventer son Liverpool et revenir aux niveaux d’antan.