Sunderland ‘Til I Die saison 2: l’essentiel en enfer est de survivre

Last Updated on 5 avril 2020 by Thibault Dreze

En cinéma, on aime les symétries, les figures de style et les plans qui se répondent. Pour cette série, Netflix en a également fait usage. Sauf que cette saison 2 de Sunderland ‘Til I Die profite d’une réalité savoureusement dramatique. Il se passe décidément quelque chose de spécial dans le nord-est de l’Angleterre.


Le point sur la saison 1 : «Sunderland ‘Til I Die», quand Netflix suit la descente aux enfers des Black Cats

!! Ce texte peut contenir des spoilers !!

Alors qu’au terme de la saison 1, on quittait un Sunderland relégué en League One (D3), non sans une teinte d’optimisme, on les retrouve donc dos au mur prêt à rebondir directement. Il faut dire que l’amateur de foot lambda n’a sans doute pas suivi ardemment les résultats de la League One saison 18-19 et que l’amateur de fiction s’est détourné du classement final des Black Cats au terme de la saison.

L’objectif ? Dévorer ce docu-série comme une fiction. En ne connaissant pas les tenants ni aboutissants et suer autant que les fans, en visionnant les péripéties du club.

Un vent nouveau

Suite à la descente, Ellis Short a décidé de quitter le navire après 10 ans à sa barre et vend le club. Le nouveau propriétaire se nomme Stewart Donald, un businessman détenteur de plusieurs sociétés et spécialisé dans les assurances. Nous reviendrons sur son cas plus tard.

Il est accompagné d’un nouveau « managing director »: Charlie Methven, qui dès son arrivée veut donner un bon coup de pied dans la fourmilière. Avec son look fait de pantalon chino et de chemise rose, c’est un leader exigeant qui sait ce qu’il veut. Le portrait que la série Netflix peint de lui est assez convaincant et, d’une certaine manière, on sent qu’il veut tirer le meilleur de ses troupes, quitte à crier un bon coup.

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Il souhaite aussi changer la chanson d’entrée des joueurs. Pour apporter un gros coup de « peps » et faire monter l’ambiance durant les matches au Stadium Of Light. Une réunion avec son staff qui vaut le détour.

« Vous devez le regarder par vous-même, mais l’extrait où Methven diffuse sa musique via son ordinateur portable à une équipe marketing perplexe en costume, pompant l’air, dans son « trip », est l’un des meilleurs morceaux de télévision que nous ayons vus depuis un certain temps », s’enthousiaste la BBC. Un moment suivi par sa discussion avec le speaker où il explique qu’il veut que le Stadium of Light soit « un peu Ibiza », un peu « Baléares ». Savoureux.

Un de ses objectifs majeurs sera de battre le record d’affluence pour un match de League One. Ce qui parviendra à faire lors du Boxing Day, avec plus de 46.000 personnes dans le stade.

Dernier pion: un nouveau coach. Jack Ross, fraîchement élu manager de l’année en première division écossaise, arrive de St Mirren avec un énorme sourire qui se refermera au fil de la saison. Même si chose étonnante à Sunderland, il restera en poste jusqu’au terme de la saison.

Côté effectif, on se sépare des gros salaires. En effet, Sunderland tourne avec une énorme masse salariale, qu’il faut baisser pour que le club fonctionne normalement et pérenne. La saison peut débuter.

Un départ qui fait croire au meilleur

Dès le premier match de la saison face à Charlton, on sent que les nerfs des supporters et dirigeants vont être mis à rude épreuve. Mené après seulement 10 minutes, Sunderland égalise à la 65e avant de finalement s’imposer dans les arrêts de jeu. S’il y avait bien un match à gagner, c’était celui-là. Le premier, à domicile, et capital pour donner la ligne directrice de la saison.

On sent une véritable tension chez les dirigeants, ils sont conscients que gagner maintenant orientera le soutien des supporters. C’est heureusement, pour tout le monde, chose faite.

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La saison se poursuit avec un certain vent de fraîcheur et de positivisme. Après 15 journées, Sunderland est bien installé à sa deuxième place. Le joueur en vue s’appelle Josh Maja, déjà introduit comme un grand espoir lors de la première saison, ses espérances sont confirmées dans la deuxième. Le joueur marque comme il respire (15 buts en 24 matches). Mais l’approche du mercato hivernal fait craindre le pire, d’autant plus que le joueur n’a toujours pas prolongé. En plus de perdre un pion important, le club pourrait aussi perdre beaucoup d’argent.

Un président attachant

C’est alors que s’engage la fameuse fenêtre de transfert hivernale toujours aussi excitante. En tant que spectateur en tout cas, car pour Stewart Donald c’est une autre histoire. En effet, Josh Maja a quitté le club sans dire au revoir, pour un montant dérisoire, et il est capital de trouver un attaquant de substitution.

« Là, nous voyons le nouveau propriétaire Stewart Donald arpenter son bureau dans les dernières heures du mercato d’hiver 2019, jurant devant son téléphone, pris dans une partie de poker avec Wigan, avant de finalement dépenser 4 millions de livres sterling sur l’attaquant Will Grigg au cours de la dernière heure. Peu de temps avant cela, son offre avait été environ quatre fois moindre », explique la BBC. Un vrai coup de sang, d’un propriétaire vexé et qui prend les choses trop personnellement, comme un tapis au poker.

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« Tu es tombé dans le piège du mercato hivernal … Mais c’est ton argent », lui glisse d’ailleurs un de ses collaborateurs avec un ton un poil provocant. 3-4 millions d’euros pour un joueur comme Will Grigg, cela semble beaucoup et personne ne peut affirmer le contraire. D’autant plus qu’il n’atteindra jamais les statistiques d’un Josh Maja, de quoi en rajouter une couche. On ne peut cependant pas s’empêcher d’éprouver une certaine forme d’attachement pour ce propriétaire impliqué.

« Ce n’est peut-être pas l’observation la plus originale, mais le propriétaire Stewart Donald semble être un gars vraiment bien », observe la BBC. « C’est peut-être l’accent du West Country qui l’adoucit, nous n’en sommes pas sûrs, mais il semble investi et ressemble également à un bon footballeur. Peut-être que nous sommes naïfs, mais sa description des matches d’Oxford United en première division avec son père et « l’odeur des cigarettes et des hamburgers » évoque une étrange nostalgie. Même si, pour certains, c’est un temps qu’ils n’ont pas vécu ».

On le découvre dans son intimité familiale et à quel point il vit ses matches. De la pinte d’échauffement, au stress du pendant et à la frustration de l’après. Un président qui transpire ses matches comme un supporter et qui n’hésite pas à se fondre à eux lors des matches en déplacement, c’est ce qu’on aime.

Retour des vieux démons

Entre fin 2018 et avril 2019, Sunderland va enchaîner quasiment 20 matches sans défaites. Mais le chat noir n’est jamais très loin. Finale de l’EFL Trophy face à Portsmouth à Wembley. Sunderland, comme souvent, ouvre la marque avant de se faire rejoindre en fin de match. Un but pour chaque équipe en prolongation et place donc à la terrible séance de tir au but. Et comme souvent avec Sunderland, c’est au bout du suspense, alors que tout le reprend espoir, que l’équipe sombre. Lee Cattermole, 10 ans au club, rate son penalty et fond en larme. Bientôt suivi par les supporters.

La fin de championnat est sunderlandesque puisque les hommes de Jack Ross terminent la saison avec un 3/18 qui les contraints à jouer les play-offs vu la 5e place finale au classement. L’adversaire est Portsmouth, équipe qu’ils n’ont pas réussi à battre en championnat et qui, histoire de remuer le couteau dans la plaie, avait battu Sunderland en finale de l’EFL Trophy à Wembley. Heureusement, les choses se passent bien en 1/2 et Sunderland retourne à Wembley pour la finale, avec cette fois-ci la volonté de gagner ces play-offs et de remonter en Championship.

Et comme toujours, quand on croit que Sunderland va aller mieux, va le faire, va gagner quelque chose, l’équipe s’écroule. Comme d’habitude, elle mène, mais se fait rejoindre. Le pire dans l’histoire c’est que l’adversaire du jour s’appelle Charlton. Vous vous souvenez ? Oui c’est la même équipe rencontrée pour le premier match de la saison et la partie s’est déroulée quasiment de manière identique. Sauf que cette fois la pièce est tombée du mauvais côté, une fois de plus. Quand on vous parlait de figures de style et de symétrie, la réalité a offert le meilleur des scénarios à Netflix. La boucle est bouclée, Sunderland reste en League One.

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De nouveau l’optimisme candide du supporter est mis à mal. Scénario tragique, fin dramatique. Mais comme la saison 1 on pense déjà au premier match de championnat 19-20. On se dit qu’on arrivera à gagner le titre. Un éternel recommencement, les peines se succèdent et on trouve toujours une raison d’y croire. C’est ça le football.


Notre avis

C’est tout l’intérêt de ce genre de docu, on a beau en connaître l’issue, le cheminement n’en reste pas moins palpitant. Tous les ingrédients qui avaient rendu la première saison sont de retour. L’amateur de football aime ce genre de contenu brut: on est plongé dans la vie d’un club, on en voit les coulisses et le fonctionnement à travers les réunions et, surtout, les discussions « informelles », car oui il y a quand même une caméra, de certains dirigeants.

Évidemment il s’agit d’une série sportive. Mais, via le prisme du football, on en apprend énormément sur l’humain. C’est une véritable fresque qui livre ses observations sur la classe ouvrière, la population et l’histoire de ce morceau du Nord-est de l’Angleterre. Comme dans la première saison, certes, mais l’arrivée de ce nouveau propriétaire, apporte une touche d’humanisme supplémentaire. On le sent proche du « peuple » et les fans lui rendent bien.

L’émotion ressentie est différente également. Le coeur ne bat plus pour éviter la relégation, mais il bat d’autant plus fort puisque durant cette saison 2, Sunderland passe tout près d’un trophée et de la montée. Un sentiment différent, mais bien plus grisant.

La série est toujours aussi intéressante, bien que raccourcie (6 épisodes contre 8) et sonne certainement aussi la fin du voyage. Leo Pearlman, l’un des producteurs, a expliqué qu’ils ne suivaient pas le club cette saison (19-20). « Nous avions l’impression que … eh bien, qui sait, s’ils avaient obtenu une promotion, alors peut-être qu’il y aurait eu une histoire à raconter. Mais cette fin de saison 18-19 semblait vraiment le bon moment pour quitter l’histoire. »

Qui sait, en cas de remontée, on pourrait bien revoir l’équipe de tournage débarquer de nouveau à Sunderland.

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